De héros à victimes
6 juillet. Fête de sainte Maria Goretti.
Jeune fille de 11 ans canonisée comme martyre en 1950.
Un jeune voisin la tue après qu’elle ait repoussé ses avances.
La culture de cette époque en fait une sainte, une martyre et non une victime.
Comment passe-t-on de l’héroïsme du refus à la glorification des victimes?
C’est la question à laquelle répond François Azouvi dans les quelque trois cents pages ‘Du héros à la victime : la métamorphose contemporaine du sacré’.
L’auteur montre comment la reconnaissance des victimes de la barbarie nazie suscite un déplacement profond, une mutation même, dans la conscience de l’Occident. D’une manière d’écrire l’histoire à partir des héros, on passe à une histoire à partir des victimes.
Il s’agit désormais de se faire reconnaitre comme ‘victimes’.
L’étalon de comparaison devient le drame de la Shoah.
Qui peut établir une échelle qui puisse mesurer un coefficient de victimisation?
Les Noirs, victimes de la traite négrière …
Les Amérindiens, victimes de la colonisation européenne …
Les Africains, victimes de l’impérialisme européen …
Les femmes, victimes du patriarcat …
Les homosexuels et les non-binaires, victimes de l’hétéronormativité …
Les jeunes, victimes du pouvoir des aînés …
Les Palestiniens, victimes du pouvoir sioniste … Etc.
Je rappelle l’humour d’une camarade de travail, il y a déjà plus de vingt ans :
‘T’es pas chanceux, Rénal. Comme mâle, tu écrases la moitié de l’humanité; comme blanc, tu en écrases les trois-quarts; comme prêtre, tu en écrases la quasi-totalité.’
Et ma pauvre réponse : ‘Il me reste à assumer!’
Rénal Dufour, prêtre et curé